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Haïti Priorise: Taxes agricoles et subventions, Josling

Présentation du problème

Les rendements stagnants de la culture du riz ont rendu celui-ci plus cher que le riz importé. Généralement, les faibles rendements résultent de problème de structure des fermes et de leur gestion. Les fermiers ont beaucoup de difficultés pour se procurer des fertilisants de par leurs prix et les contraintes d’approvisionnement ; d’autre part, il y a peu d’information adéquate concernant la fertilisation correcte des cultures. Les riziculteurs souffrent d’une infrastructure pauvre et d’un accès au crédit inapproprié. Les catastrophes naturelles ont un impact énorme sur la vie rurale.

Solutions

  • Augmenter les taxes d’importation du riz
  • Subventionner les fertilisants
  • Assurer les cultures

Tableau récapitulatif du RAC

Interventions Avantages Coûts RAC
Taxe d’importation du riz 11,8 milliards de gourdes (170,5 millions de dollars) 14 milliards de gourdes (202,5 millions de dollars) 0,8
Assurances des cultures 12,1 milliards de gourdes (175 millions de dollars) 9,5 milliards de gourdes (137,7 millions de dollars) 1,9
Subventions d’engrais 61 milliards de gourdes (883,9 millions de dollars) 16,3 milliards de gourdes (235,9 millions de dollars) 3,7

Augmenter les taxes d’importation du riz

Une taxe de 20% imposée sur le riz importé pendant une période de 10 ans. Cela reste plus faible que les 35% en vigueur avant que la libéralisation du commerce  n’ait été mise en place en 1995. La taxe serait réduite à partir de la septième année puis éliminée progressivement jusqu’à la dixième année.

Haïti possède un système commercial relativement libéral et les taxes d’importation du riz sont les plus faibles des Caraïbes. La libéralisation a conduit à une diminution du prix de la nourriture, ce qui est un avantage pour la population urbaine. Un faible prix a permis l’importation du riz américain (connu localement comme « riz de Miami ») en quantités considérables, qui a dépassé la production nationale. Ce qui peut être un bien pour les consommateurs des villes se révèle être problématique pour les fermiers et l’économie rurale.

La taxe du riz a été source de conflit depuis lors et beaucoup de personnes ont réclamé sa réinstauration.

Bien que la libéralisation du commerce soit souvent accusée d’avoir un impact majeur sur la culture du riz, les données sur la production nationale n’indiquent pas de changement particulier depuis les années 90.

Avantages et coûts

Dès la première année, l’instauration d’une taxe d’importation permettrait aux fermiers d’augmenter leurs revenus de 1,7 milliards de gourdes (25 millions de dollars). Cela se traduirait par un supplément de revenus de 11,7 milliards de gourdes (170 millions de dollars) sur 10 ans. L’État pourrait collecter 7,8 milliards de gourdes (114 millions de dollars) la première année et 57,8 milliards de gourdes (385 millions de dollars) sur 10 ans. 

Les importations continueraient d’augmenter et au bout de 10 ans la production de riz haïtien serait de 93 400 tonnes comparées aux 84 900 tonnes en absence de taxe d’importation.

Les importateurs du « riz de Miami » répercuteraient l’augmentation du coût sur les consommateurs. Au final, ceux-ci  devraient payer 9,9 milliards de gourdes (143 millions de dollars) de plus pour le riz la première année et 72 milliards de gourdes (1,04 milliard de dollars) sur 10 ans.  Cet impact pourrait être réduit si le gouvernement utilisait ses nouvelles rentrées pour baisser le prix à la consommation. Cela annulerait l’augmentation globale pour les consommateurs estimée à 13,9 milliards de gourdes (202 millions de dollars) mais éliminerait complètement les rentrées supplémentaires pour l’État.

Quel que soit la décision de l’État, la réglementation coûterait davantage à l’économie haïtienne qu’elle ne lui bénéficierait. Alors qu’elle serait positive pour les fermiers, elle entraînerait un coût supplémentaire pour les consommateurs, ce qui aurait comme conséquence qu’une gourde dépensée générerait moins d’une gourde de bénéfices.

Une taxe d’importation sur le riz pourrait être éventuellement rentable si elle devait encourager les fermiers à améliorer leurs pratiques agricoles et devenir plus productifs. Il faudrait que le rendement de production du riz augmente de 20%  pour que les avantages soient supérieurs aux coûts.

Subventionnement des fertilisants utilisés pour la production de riz

Une subvention de 50% par rapport au prix du marché de l’urée pendant cinq ans, puis une réduction de 10% annuelle pour s’annuler la dixième année.

Des politiques de subventions ont souvent été appliquées dans le passé en Haïti mais ont eu des résultats inégaux. Les subventions furent appliquées la première fois dans les années 80 et à la fin des années 90, cette politique reçut l’appui du gouvernement japonais  au travers d’un accord sur 10 ans.

Plusieurs facteurs sont responsables des faibles rendements d’une culture quelle qu’elle soit, mais en considérant un apport d’eau adéquat et une lutte raisonnable des parasites et  des mauvaises herbes, la disponibilité d’azote est un facteur crucial, particulièrement pour les sols épuisés et victimes d’érosion comme ceux d’Haïti. Fournir des fertilisants aux fermiers et encourager leur emploi efficace pourrait booster le secteur.

Avantages et coûts

Le subventionnement proposé coûterait 1,8 milliard de gourdes (27,4 millions de dollars) la première année et les fertilisants supplémentaires  reviendraient à 608 millions de gourdes (8,8 millions de dollars).  On estime que les ventes de fertilisants croîtraient de 750 à 1132 tonnes la première année tandis que le coût  pour les fermiers  diminuerait de 2,4 milliards de gourdes (36 millions de dollars) à 1,2 milliard de gourdes (18,6 millions de dollars).

Le revenu par ferme augmenterait de 53% puisque les récoltes de riz passeraient de 147 000 tonnes à 225 000 tonnes. La production supplémentaire serait estimée à 7,8 milliards de gourdes (112,6 millions de dollars) et la diminution du coût des fertilisants à 1,2 milliard de gourdes (18,6 millions de dollars). En dix ans, les coûts s’élèveraient à environ 16,3 milliards de gourdes (236 millions de dollars) avec les deux-tiers constitués par les subventions et un tiers par l’achat de fertilisants supplémentaires. Les bénéfices s’élèveraient à 61 milliards de gourdes (884 millions de dollars) sur la décennie dont 10% proviendraient de la réduction du coût d’achat des fertilisants et 90%  de l’accroissement de la production de riz.

Des experts font remarquer qu’Haïti n’a pas eu d’expériences positives avec les subventions d’engrais depuis l’année 2000.  Même des subventions de 50% n’ont pas favorisé l’emploi des fertilisants en Haïti. Des audits ont révélé que le clientélisme avait conduit à une mauvaise distribution  des subventions d’engrais. Comme l’État achetait  et distribuait les fertilisants subventionnés souvent au pied levé,  les autres vendeurs importaient moins qu’ils n’auraient pu de peur de se retrouver avec des stocks d’invendus. 

Cela nous indique que toute politique doit être élaborée avec précaution. Les subventions doivent être distribuées de telle sorte qu’elles évitent le clientélisme et la malversation, tout en permettant aux fermiers d’obtenir davantage d’engrais. Cela pourrait être atteint par l’utilisation de bons de fertilisants, ce qui donnerait le contrôle aux agriculteurs. Cette organisation a fait ses preuves dans plusieurs projets du Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement (MARNDR).

Assurances des cultures pour les riziculteurs

Une simple assurance qui compenserait la différence entre le rendement observé dans les champs des fermiers avec le rendement moyen établi dans leur région. La différence de rendement est alors multipliée  par le prix afin de fournir un paiement en liquide au fermier. Ainsi, celui-ci aurait un revenu garanti plus stable même dans le cas de maigres récoltes.

Avantages et coûts

Les coûts comprennent les frais de lancement, ceux de fonctionnement, les paiements aux fermiers lors des mauvaises années et les primes d’assurance payées aux fermiers eux-mêmes (environ 1400 gourdes ou 20$ par hectare).

L’ensemble des frais de lancement du programme s’élèvent à 13,8 millions de gourdes (200 000$) avec des coûts supplémentaires de 6,9 millions de gourdes (100 000$) et de 3,4 millions de gourdes (50 000$) dans les deux années suivantes, ainsi que des frais de fonctionnement de 3,4 millions de gourdes (50 000$). Les primes d’assurance devraient coûter 9,4 millions de gourdes (137 000$) lors de la première année, puis augmenter lentement après cela.

Les versements dans la région seraient de 1,2 milliard de gourdes (17,5 millions de dollars) dans le cas où une compensation serait donnée. En tout, les coûts monteraient à 6,2 milliards de gourdes (90 millions de dollars) en dix ans.

Lors des bonnes années, entre 9 et 17% de riz seraient produits en plus. Cela augmenterait les rendements, ce qui se traduirait par un revenu moyen annuel plus élevé  de 692 millions de gourdes (10 millions de dollars).

Au total, en incluant les versements d’assurance, les avantages sur dix ans  atteindraient 12,1 milliards de gourdes (175 millions de dollars).